Ouragan Melissa: «On dirait qu’un tsunami est passé»

Yvonne, quelle situation as-tu trouvée à ton arrivée à Cuba?

Rien de particulier en arrivant à La Havane, la capitale de Cuba, mais plus nous avancions vers l’est, plus l’ampleur de la catastrophe devenait évidente: palmiers cassés, champs inondés, maisons, routes et ponts détruits… Les ravages causés dans les zones côtières font penser au passage d’un tsunami.

Comment va la population?

De nombreuses personnes ont perdu leur maison et presque tous leurs biens. Les évacuations ont bien fonctionné, mais beaucoup n’ont pu emporter que le strict nécessaire. On voit des maisons où le mobilier est recouvert de boue, aux toits arrachés, aux murs effondrés.

J’ai d’abord été frappée par la résilience apparente des gens. Un homme m’a dit qu’ils étaient des combattants, qu’ils avaient survécu et qu’ils ne se laisseraient pas abattre.

En écoutant attentivement, je me suis toutefois rendu compte que de nombreuses personnes étaient traumatisées. Dans un village de pêcheurs, nous avons engagé la conversation avec un groupe de villageois. Quand nous avons parlé de l’ouragan, presque tous se sont mis à pleurer. Ils sont nombreux à faire des cauchemars. Si la plupart ont déjà vécu le passage d’un ouragan et dû réparer leur maison au moins une fois, le phénomène a cette fois été particulièrement destructeur, m’ont-ils dit.

Vous allez rétablir l’approvisionnement en eau potable pour 10 000 personnes. Comment procédez-vous?

Les inondations ont lourdement contaminé l’eau potable. L’équipe d’intervention suisse a livré par avion un système mobile de traitement de l’eau qui garantit l’accès à une eau salubre. Cette mesure s’inscrit dans l’aide d’urgence et se conçoit comme une solution transitoire jusqu’à ce que la desserte régulière en eau potable soit rétablie, d’ici quelques mois.

En collaboration avec une équipe d’aide d’urgence de Suisse, la Croix-Rouge cubaine et les autorités cubaines chargées de l’eau, nous analysons actuellement la situation dans les villages et déterminons ceux qui se prêtent le mieux à l’utilisation de ces systèmes.

Qu’est-ce qui ressort de cette mission au plan de la prévention de catastrophes?

La préparation solide au passage de l’ouragan et l’évacuation rapide ont permis de sauver des vies – jusqu’à présent, aucun décès n’a été enregistré par les autorités. En très peu de temps, la Croix-Rouge cubaine a pu mobiliser des milliers de bénévoles pour encadrer l’évacuation des villages et repérer les personnes vulnérables dans l’incapacité de quitter la zone dangereuse par leurs propres moyens. La collaboration coordonnée avec les autorités et le stockage stratégique de biens de secours ont également contribué au déploiement rapide de l’aide sur place.

Qu’est-ce qui te motive personnellement à t’engager ainsi?

Je suis animée par l’esprit humanitaire. Je vis dans un pays sans guerre où les catastrophes sont rares: c’est un privilège. En même temps, j’ai des compétences que je peux partager. Grâce à son maillage planétaire, le Mouvement international de la Croix-Rouge peut apporter une aide rapide. C’est impressionnant de voir à quelle vitesse tout se met en marche, et c’est très gratifiant d’en apprendre autant sur un pays, sa culture et sa population à l’occasion d’une telle mission. L’équipe se soude très vite, on construit des relations – on reçoit beaucoup en retour.